Deux fois déjà au cours du siècle, les Allemands et les Français
se sont faits la guerre. Cela ne doit plus jamais arriver. C'est
pourquoi les traités franco-allemands ont été signés et que les
nations occidentales aspirèrent à une Europe unie. L'Allemagne et
la France, jadis ennemis héréditaires, ont enterré la hache de guerre
pour toujours. Au terme de la Guerre froide et après la "Révolution
non-violente", les Allemands de l'ex-RDA et comme d'autres peuples
d'Europe de l'Est ont profité de cette chance pour conquérir leur
liberté. Il est temps de surmonter une fois pour toute, la division
artificielle de l'Europe afin de créer une base solide pour l'instauration
d'une paix durable .Dans les années à venir, l'Estonie, la Pologne,
la le République tchèque, la Hongrie, la Slovénie et Chypre devraient
être intégrées à l'Union Européenne. Elles seront suivies plus tard
par la Roumanie, la Bulgarie, la Lettonie, la Lituanie et la Slovaquie.
Pour ces pays, l'Europe joue un rôle bien plus important que celui
d'un distributeur de subventions ou d'une zone de libre échange.
Les pays d'Europe centrale ont une longue histoire européenne et
veulent réintégrer leur sphère culturelle historique. L'Union Européenne
constitue un gage pour la démocratie, l'état de droit et la croissance
économique. Elle est la meilleure garantie pour sauvegarder la paix
, la sécurité et la liberté. C'est pour ces raisons que nous considérons
l'élargissement à l'Est de l'Union comme le fondement d'une véritable
paix européenne prenant en compte l'Europe orientale et la Russie.
A long terme l'élargissement à l'Est paraît réalisable sur les plans
économique, social et écologique. Il constitue un intérêt européen,
mais également allemand et français; en effet, les pays exportateurs
commencent déjà à bénéficier du développement du plus grand marché
intérieur du monde. Les coûts liés à l'élargissement représentent
donc des investissements sur l'avenir.
Cependant, des réformes sont indispensables pour assurer le succès
de l'élargissement à l'Est et pour garantir que l'Union européenne
puisse continuer à fonctionner après l'accroissement du nombre de
ses Etats membres. Les réformes et l'élargissement de l'Union Européenne
vont de pair.
Ce processus de réformes ne peut réussir que si l'entente franco-allemande
fonctionne sans accrocs. Les deux pays ont été les moteurs de l'Union
et de son élargissement aux pays d'Europe de l'Est. Certes, il y
aura toujours des discussions sur les modalités du processus, mais
le but fondamental demeure incontesté.
A l'heure actuelle, on s'intéresse surtout à l'introduction de la
monnaie unique. L'introduction de l'Euro constitue un pas important
qui en appel d'autres. Le scepticisme des Allemands à l'égard de
cette monnaie unique est flagrant. Les allemands ne pourront faire
confiance à la monnaie unique, que si elle s'accompagne d'une politique
économique et sociale cohérente. Cela est précisément l'objet de
maintes discussions entre le SPD et le gouvernement de Helmut Kohl.
Pour notre part, nous (le SPD) sommes du même avis que le gouvernement
de Lionel Jospin: nous devons lutter ensembles contre le chômage
qui touche désormais 20 millions de personnes en Europe. Ce sera
la prochaine préoccupation; c'est précisément là où la coopération
franco-allemande pourrait redevenir un moteur de la politique européenne.
Sans la mise en œuvre de réformes au sein de l'UE, l'intégration
des pays d'Europe de l'Est ne pourra pas avoir lieu. L'intégration
des six pays manifestant leur désir d'entrer dans l'Union européenne
constitue une étape décisive pour que toutes les nations européennes
puissent vivre ensemble dans la paix. Je suis du même avis que Monsieur
Védrine: il est indispensable de mettre en œuvre des réformes qui
n'ont pas pu être intégrées dans le Traité d'Amsterdam. La réorganisation
de la politique agricole en Europe en fait partie. Un gouvernement
mené par le SPD s'occupera -avec le gouvernement français - de la
mise en route des réformes nécessaires. Leur but sera de garantir
le fonctionnement des institutions, tout en préservant le degré
d'intégration déjà acquis.
- Il faut continuer à démocratiser l'Union. Son organisation doit
être proche du citoyen. Nous revendiquons le droit pour le Parlement
européen d'intervenir à toute heure et rejetons toute "sur-régularisation"
ou centralisation.
- Le Conseil des Ministres doit enfin devenir capable d'agir. A
long terme le principe de l'unanimité risque de devenir "autoblocant".
Les décisions à la majorité sont essentielles . Il est évident que
nous devons discuter sur une nouvelle pondération des voix au sein
de l'Union.
- L'Euro va arriver. C'est une véritable chance. Il rendra pourtant
la compétition plus rigoureuse en Europe. Une politique européenne
de l'emploi devient indispensable si l'on considère les 20 millions
de chômeurs. Les politiques fiscale, économique et financière doivent
être adaptées à l'échelle européenne. Nous avons aussi besoin de
normes écologiques et sociales minimales. L'adhésion des pays de
l'Est ne doit pas provoquer d'exclusions sociales.
- Etant donné l'importance du secteur agricole dans la plupart des
pays désirant adhérer à l'Union Européenne, il n'est pas possible
de procéder à leur intégration sans une réforme de la PAC. L'application
du système de subvention européen actuel rendrait la facture beaucoup
trop lourde. Le secteur agricole, qui représente 50% du budget européen,
n'est pas assez efficace. La mise en place de nouvelles infrastructures
et de nouvelles méthodes d'administration pour les futurs membres,
ne peut être financée que par une réorganisation effective du secteur
agricole.
- Il est évident que l'élargissement de l'Union Européenne et l'accroissement
de ses attributions générera une augmentation de son coût de fonctionnement.
Nous voulons que l'Europe continue à être en mesure de répondre
aux défis auxquels elle doit faire face et souhaitons qu'elle le
fasse à un prix abordable. Il est également évident, que l'Allemagne
ne devra pas être la seule à en financer le surcoût. Depuis des
années, l'Allemagne paie la plus grande partie des charges nettes
européennes. Le financement de l'Union Européenne et les efforts
qui devront être consentis dans le cadre de l'élargissement concerne
tous les Etats membres.
Les futurs Etats membres doivent, eux aussi, effectuer certaines
réformes. Ils sont censés évoluer sur les plans social et économique
afin de pouvoir répondre aux exigences du Traité d'adhésion. Ils
doivent faire respecter les droits de l'Homme, la protection des
minorités, l'ordre démocratique et l'état de droit. Par ailleurs
il est indispensable qu'ils aient un niveau économique, qui leur
permettra de supporter la pression du marché européen. Cela exige
bien sûr une responsabilisation des pays de l'Est ainsi que l'accomplissement
de véritables efforts, mais aussi un soutien de l'Union. Voilà pourquoi
il est nécessaire de passer un accord transitoire pour permettre
aux pays de d'Europe de l'Est de prendre part aux politiques structurelles
de l'Union.
Si le SPD gagne les élections de l'automne et si Gerhard Schröder
devient chancelier, nous renouerons avec la bonne et vieille tradition
franco-allemande. Nous nous souvenons de la coopération étroite
entre Helmut Schmidt et Giscard d'Estaing. La bonne entente entre
la démocratie sociale allemande et le parti socialiste français
constituera une base solide pour le bon fonctionnement de la coopération
franco-allemande. Cette base solide est indispensable pour la réalisation
du processus d'élargissement et d'unification européenne.
Traduction Forum
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