Javier Solana a été Secrétaire général de l'OTAN de
décembre 1995 à octobre 1999; il est Secrétaire général du
Conseil de l'UE - Haut représentant pour la PESC depuis le 18 octobre
1999 et Secrétaire général de l'UEO depuis le 25 novembre 1999
L'OTAN a un rôle clé à jouer en aidant à créer la nouvelle architecture
de sécurité de l'Europe. Le Sommet de Madrid de juillet 1997 a pris
des décisions essentielles visant à faire en sorte que l'adaptation
et la transformation de l'Alliance se poursuivent à un rythme soutenu
et qu'elles atteignent bientôt leur point culminant. Nous attendons
aujourd'hui avec confiance et impatience la prochaine réunion des
chefs d'Etat et de gouvernement de l'Alliance, qui se tiendra à
Washington en avril 1999. Nous y célébrerons, à l'occasion du 50e
anniversaire de l'OTAN, un demi-siècle de réalisations de l'Alliance.
Mais, ce qui est plus important, nous ferons le point, à la veille
du XXIe siècle, sur les défis qui peuvent encore nous attendre,
et sur la nouvelle Alliance à laquelle nous donnons forme en vue
de relever ces défis.
Nous espérons et comptons aussi, au Sommet de Washington, accueillir
au sein de l'Alliance, comme membres à part entière, la République
tchèque, la Hongrie et la Pologne. Ces trois pays rejoindront une
communauté de nations qui partagent des valeurs démocratiques communes
et qui sont déterminées à assurer la défense collective de chacune
d'entre elles. L'union au sein de cette communauté est assurée par
un solide lien transatlantique. Ces principes de base n'ont pas
seulement contribué de façon essentielle à maintenir la paix et
la stabilité pendant toute la durée de la Guerre froide. Ils ont
aussi permis que l'OTAN - plus, peut-être, que toute autre institution
- s'adapte remarquablement bien au nouvel environnement de sécurité.
Au Sommet de Madrid de juillet 1997, la République tchèque, la Hongrie
et la Pologne ont été invitées à entamer des pourparlers d'adhésion.
Au cours de ces pourparlers, les trois pays invités ont tous fait
preuve d'un remarquable niveau de préparation à l'entrée dans l'Alliance.
Cela a préparé le terrain pour le processus de ratification en cours
dans les seize pays membres de l'OTAN. Notre objectif est d'accueillir
ces pays en tant que membres à part entière d'ici au mois d'avril
de l'année prochaine. Dès leur adhésion, ils deviendront ainsi non
seulement consommateurs mais producteurs de sécurité. Le succès
de l'intégration des trois pays invités dans les structures de l'Alliance
sera également de bon augure pour l'adhésion future d'autres pays
candidats.
A Madrid, les chefs d'Etat et de gouvernement de l'OTAN ont été
formels : l'OTAN doit rester ouverte, et les premiers nouveaux membres
ne seront pas les derniers. De fait, le Sommet a bien précisé qu'aucun
pays européen démocratique, quelle que soit sa situation géographique,
ne sera exclu du processus d'examen. Ce message de la porte ouverte
a été entendu. Les pays qui aspirent à entrer dans l'OTAN ont déjà
clairement indiqué qu'il continueront de faire pression dans ce
sens et qu'ils prendront toutes les mesures nécessaires pour rejoindre
l'Alliance. L'attachement de l'OTAN à une Europe sans division,
fondée sur la coopération, n'apparaît pas seulement dans notre politique,
mais, en fait, dans les structures mêmes et dans les nouveaux mécanismes
de coopération de l'Alliance, qui sont conçus pour améliorer les
formes de coopération avec nos anciens adversaires et avec d'autres
Etats.
Notre initiative du Partenariat pour la paix est l'un de ces mécanismes.
Aujourd'hui, le Partenariat regroupe 27 Etats très divers - de l'Autriche
à l'Albanie et de la Russie à l'Ukraine. Il offre à ces pays et
à l'OTAN la possibilité de coopérer dans des domaines tels que le
maintien de la paix, les plans civils d'urgence ou le contrôle démocratique
des forces armées. A court terme, cette coopération devrait nous
permettre d'amasser une somme de compétences militaires auxquelles
nous pourrions faire appel si une crise éclatait. A plus long terme,
la coopération entrant dans le cadre du Partenariat nous aidera
à créer une culture stratégique commune, qui rende une crise de
moins en moins vraisemblable.
Le Conseil de partenariat euro-atlantique (CPEA), qui donne aux
Partenaires et aux Alliés la possibilité d'avoir d'étroites consultations
politiques, offre un "toit" politique au Partenariat. Pareilles
consultations sont particulièrement importantes pour le cas où des
Partenaires se joindraient aux Alliés dans une opération commune.
Mais le CPEA constitue aussi pour nous un centre de débat où peuvent
être définies de nouvelles approches à l'égard de la sécurité régionale,
de la coopération économique dans le domaine de la défense, ou des
secours en cas de catastrophe. Le CPEA vient donc compléter un Partenariat
pour la paix de plus en plus opérationnel.
L'OTAN a aussi mis en place des mécanismes destinés à prendre en
compte l'importance et le poids particuliers de la Russie dans la
sécurité européenne. L'Acte fondateur OTAN-Russie, signé en mai
1997, a institué un Conseil conjoint permanent, au sein duquel les
Alliés et la Russie peuvent se consulter sur des questions de sécurité
et de défense. Aujourd'hui, cette instance supervise les activités
de coopération menées par l'OTAN et la Russie dans plusieurs domaines,
tels que le maintien de la paix, les aspects environnementaux de
la défense et la prévention de la prolifération.
De même, les nouvelles relations spécifiques entre l'OTAN et l'Ukraine,
officialisées au Sommet de Madrid en juillet 1997, permettent de
donner une orientation précise et une impulsion à notre coopération
de plus en plus intense avec cet important pays.
La sécurité en Europe est étroitement liée aussi à la sécurité et
à la stabilité en Méditerranée. C'est pourquoi l'OTAN a entamé un
nouveau dialogue institutionnalisé avec des pays non membres de
l'OTAN situés au sud de la Méditerranée. Nous estimons qu'il est
possible d'établir de bonnes relations, solides et amicales, de
part et d'autre de la Méditerranée, tout comme nous l'avons fait
d'un bout à l'autre de l'Europe.
Mais le rôle de l'OTAN comme catalyseur du changement politique
ne se limite pas à l'Europe centrale et orientale. Ce rôle a été
capital dans les tentatives faites pour mettre fin au conflit en
Bosnie. L'opération de maintien de la paix menée en Bosnie sous
la direction de l'OTAN rassemble une coalition internationale unique
au service de la paix, comprenant des soldats de plus de trente
pays. La SFOR est un exemple manifeste des caractéristiques essentielles
de l'OTAN : la cohésion transatlantique et une planification militaire
rationnelle.
Pourtant, sa portée dépasse de loin l'Alliance atlantique elle-même.
En unissant de si nombreux pays derrière une cause commune, l'OTAN
a prouvé qu'une nouvelle architecture de sécurité européenne est,
en fait, en train de s'édifier. Dans cette architecture de sécurité
européenne, chaque pays - allié ou partenaire - a un rôle spécifique
à jouer.
Le 50e anniversaire de l'Alliance, en 1999, permettra de célébrer
le caractère unique de l'OTAN et de ses réalisations. Mais, élément
plus important encore, ce sera l'occasion de consolider la vaste
et remarquable adaptation que l'Alliance a entreprise ces dernières
années. Et ce sera l'occasion de montrer la nouvelle OTAN, l'OTAN
qui s'est adaptée, comme un instrument qui est essentiel pour notre
sécurité et qui contribue en même temps à assurer la sécurité dans
toute la zone euro-atlantique.
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