La reprise de la place de la Hongrie dans la communauté des
nations européennes a servi de point de départ au nouveau gouvernement
hongrois, formé en été 1998, pour l'élaboration du concept de sa
politique étrangère. C'est sur cette même base qu'il souhaite contribuer
à la création des conditions interna-tionales favorables à " l'embourgeoisement "
interne. Ce gouvernement s'identifie avec les priorités de la politique
étrangère fondées sur un consensus national acquis après le changement
du système politique, à savoir : l'intégration du pays dans les
organisations euro-atlantiques, une politique de bon voisinage et
une politique de la Nation consistant à accorder une attention particulière
aux intérêts des communautés hongroises à l'étranger. Cette politique
fait en sorte qu'il y ait un équilibre parmi ces trois objectifs.
Nous n'avons pas oublié qu'aucun de ces objectifs ne peut être subordonné
à l'autre et ne peut prévaloir au détriment d'un autre. La mise
en œuvre de ces objectifs crée une interdépendance entre eux et
en même temps les lie ensemble.
Notre diplomatie est consciente du fait que la stabilité régionale
est indispensable pour la réussite de la politique de l'intégration
euro-atlantique. En même temps, notre succès dans l'avancement de
la politique de notre intégration euro-atlantique renforce non seulement
la sécurité et la coopération régionales, mais offre également l'occasion
d'avancer dans le processus de l'arrangement de la situation des
communautés hongroises vivant outre nos frontières. L'application
des traités de base et des autres accords conclus avec nos voisins,
ainsi que le respect des droits des minorités nationales, renforcent
la stabilité et la coopération régionales et facilite le succès
de la participation au processus de l'intégration européenne.
La politique d'intégration du gouvernement hongrois exprime et représente
avec détermination les intérêts nationaux. C'est dans cet esprit
que nous menons les négociations sur notre adhésion à l'Union européenne
et que nous poursuivons notre préparation interne pour devenir membre
de l'Union - en 2002. Nous considérons que, lors des négociations
sur l'adhésion, il est essentiel de faire valoir les intérêts économiques
de notre pays de façon à ce que cela ne retarde pas la date de notre
admission. Nous devons adhérer à l'Union à des conditions aussi
favorables que possible au regard de nos intérêts nationaux.
Entre-temps, nous souhaitons contribuer à la création d'une Europe
politiquement et économiquement unie, par tous les moyens à notre
disposition, ainsi que renforcer cette unité. Nous sommes convaincus
que les défis de l'avenir, tels que la concurrence dans l'économie
mondiale, la révolution dans le domaine de l'informatique, la protection
de l'environnement, la lutte contre le crime organisé, le renouveau
moral et culturel et la gestion des tensions qui subsistent dans
nos régions, appellent à une unification politique et économique
du continent.
La transformation du système de sécurité européen
Dans la nouvelle architecture de sécurité européenne qui est en
train de se former de nos jours, la prévention des conflits jouera
un rôle de plus en plus déterminant. Par exemple, la prévention
des conflits est devenue la tâche principale de l'OSCE, organisation
qui comprend le plus grand nombre d'États membres sur notre continent.
A travers la création d'une Politique Étrangère et de Sécurité Commune,
l'Union européenne peut également jouer un rôle significatif dans
la prévention des conflits et dans le renforcement de la sécurité.
Néanmoins, dans la situation géopolitique actuelle, l'OTAN demeure,
sans aucun doute, la pierre angulaire du nouveau système de sécurité
car, outre le fait qu'elle constitue une communauté solide d'intérêts
et de valeurs, elle est indéniablement la seule organisation dotée
d'une force militaire crédible. Comme elle l'a déjà déclaré à plusieurs
reprises, l'Alliance considère que son principal objectif est d'étendre
au continent entier la sécurité et la stabilité qui caractérisent
la communauté euro-atlantique.
A notre avis, un système européen capable de faire face aux défis
actuels et futurs doit s'appuyer sur les piliers suivants: l'OTAN,
l'Union Européenne (et l'UEO), l'Organisation pour la Sécurité et
la Coopération en Europe (OSCE), et enfin, le Conseil de l'Europe
qui représente les valeurs généralement admises de notre civilisation,
avec une attention particulière à la protection des droits de l'homme
et ceux des minorités. Actuellement, la tâche de l'OTAN et de l'Union
européenne est d'étendre la zone de stabilité au-delà des frontières
de leurs États membres.
Parallèlement, le gouvernement hongrois attribue une grande importance
à la coopération régionale ayant pour objectif la réduction des
nouveaux types de risques pour la sécurité. Nous ne faisons pas
seulement référence aux conflits locaux, mais aussi aux dangers
dépassant les frontières nationales tels que le crime organisé,
le trafic des drogues, le terrorisme international et le commerce
illégal des armes. La lutte contre de telles menaces est l'intérêt
et même le devoir de chaque Etat démocratique.
Les événements tragiques qui se sont déroulés sur le territoire
de l'ex-Yougoslavie - et tout récemment encore au Kosovo - nous
ont rappelé une fois de plus et de manière dramatique que le concept
de sécurité dépasse largement sa définition strictement militaire
et que la sécurité de l'Europe est indivisible. Les situations de
crise nous ont également mis en garde en nous montrant qu'une organisation,
aussi efficace qu'elle soit, ne peut pas résoudre toute seule les
problèmes économiques, sociaux, environnementaux et de sécurité
d'une région et encore moins d'un continent tout entier. A long
terme, on ne peut parvenir à une véritable stabilité qu'à l'aide
d'un système efficace d'institutions se renforçant mutuellement
et au sein desquelles chaque pays trouve sa place et a la capacité
de défendre ses intérêts. La réalisation d'un tel objectif va également
charger la communauté internationale de tâches considérables à long
terme.
L'élargissement de l'OTAN n'est pas seulement un moyen efficace
pour gérer les risques actuels et futurs, mais il aide aussi à éviter
les menaces qui pourraient apparaître à l'avenir. Pendant les débats
aux Etats-Unis sur les protocoles d'adhésion des trois nouveaux
membres de l'OTAN, il a été dit qu'à cause des nouveaux membres,
les vies des soldats américains allaient être sacrifiées pour les
villes d'Europe centrale en cas d'un conflit armé. En réalité, l'élargissement
en tant que tel est déjà une garantie pour qu'il n'y ait pas de
menace pour la vie d'aucun soldat de n'importe quel pays membre
de l'OTAN. Jusqu'à aujourd'hui, l'histoire de l'OTAN a été une réussite
; l'existence et le fonctionnement efficace de l'Alliance Atlantique
a, pendant le dernier demi-siècle, épargné à l'OTAN la nécessité
de recourir aux armes pour mettre en valeur la défense collective
prévue par l'article 5 du Traité de Washington.
Que recherchons-nous dans l'OTAN ?
A l'instar du processus de notre intégration en général, la politique
étrangère de la Hongrie concernant l'accession à l'Alliance Atlantique
est également guidée par des intérêts nationaux. Jusqu'à présent,
nous avons essayé de montrer les raisons pour lesquelles l'élargissement
de l'OTAN sert les intérêts de notre continent tout entier. Mais
quels sont les intérêts typiquement hongrois liés à notre adhésion
à l'Alliance ? Cette question s'est également posée de façon beaucoup
plus simple lors des débats qui se sont déroulés au cours des dernières
années au sein de la société hongroise : qu'attendons-nous de l'OTAN
?
En premier lieu et avant tout, nous recherchons un environnement
de stabilité, de paix et de sécurité, des conditions externes favorables
au développement de notre pays afin de renforcer davantage les conditions
d'une croissance durable. L'élargissement de l'OTAN est perçu par
la Hongrie comme l'extension de la zone de sécurité et de stabilité
vers l'Est. Notre entrée dans l'Alliance n'a pas été motivée par
une sorte de peur face à une menace extérieure ou à une menace de
guerre, mais plutôt par la volonté de voir notre pays profiter des
avantages découlant de la stabilité et de l'appartenance à une communauté
de nations partageant le même système de valeurs démocratiques,
et par la volonté d'apporter notre contribution appropriée à l'établissement
de la sécurité collective.
Nous espérons également que notre nouveau statut de membre de l'Alliance
récemment acquis ait un effet positif sur nos relations économiques.
Si la Hongrie est déjà considérée comme une partie stable de l'Europe,
elle sera encore plus attractive qu'elle ne l'est aujourd'hui en
devenant un partenaire solide pour la coopération économique du
point de vue des investissements étrangers.
Contribution aux objectifs communs
Pour être admis à l'Alliance, tous les pays candidats doivent remplir
certain critères. Cela était également valable pour les trois nouveaux
membres. Parmi les critères, les plus importants étaient l'établissement
d'un système politique démocratique, une économie de marché efficace,
l'existence de relations de bon voisinage avec les pays voisins,
un contrôle démocratique et civil des forces armées et la capacité
de coopérer avec les forces armées des autres États membres, c'est-à-dire,
en un mot, l'interopérabilité. Il ne peut y avoir aucun doute, la
Hongrie a pleinement rempli les critères politiques. Néanmoins,
avec l'avancement de notre préparation et l'approche de la date
d'accession, l'attention se concentrait de plus en plus sur les
tâches qui restaient encore à accomplir.
Nous devons poursuivre la modernisation de nos forces armées et
entreprendre des efforts particulièrement importants dans certains
domaines cruciaux pour atteindre un niveau approprié d'interopérabilité.
En revanche, la dite "interopérabilité des esprits", c'est-à-dire
le facteur humain, est encore plus importante que le développement
technique et les achats des équipements. Parallèlement, le gouvernement
hongrois a clairement pris l'engagement d'être en mesure, dès son
accession, d'accomplir les tâches quotidiennes de la coopération.
Bien évidemment, cela exige également que nous maintenions nos dépenses
militaires au niveau requis. Dans cette perspective, il existe des
conditions économiques préalables : le pays est sur la voie d'une
croissance économique durable qui nous permet d'augmenter régulièrement
la part de notre PIB consacrée aux dépenses militaires pour qu'elles
atteignent le niveau de 1,81% d'ici 2001. Concrètement, cela représentera
une augmentation annuelle de 8 à 10% de nos dépenses en matière
de défense.
Nous sommes bien conscients du fait que sur le plan du potentiel
strictement militaire, l'entrée de la Hongrie dans l'OTAN n'augmente
pas de manière substantielle les forces communes de l'Alliance.
Cependant, nous sommes convaincus qu'en tant que membre de l'OTAN,
nous sommes en mesure de contribuer au maintien de la paix et au
renforcement de la sécurité dans notre région. L'extension de la
zone de stabilité et de sécurité et le recours à notre expérience
dans cette région pleine de graves problèmes ethniques, politiques
et économiques sont autant d'éléments qui expliquaient et justifiaient
notre souhait d'appartenir au commandement du flanc Sud de l'OTAN.
Nous sommes conscients de notre responsabilité pour la sécurité
dans notre région
Contrairement aux inquiétudes selon lesquelles l'élargissement de
l'OTAN pourrait créer une nouvelle ligne de rupture dans notre région,
nous pouvons faire remarquer sans ambiguïté que ce processus a eu
un effet stabilisant sur les pays de la région en phase de transition
et qu'il a contribué à renforcer la sécurité de la région et les
relations bilatérales. L'entrée de la Hongrie a sans aucun doute
influé de manière positive sur le développement de nos relations
bilatérales avec nos voisins. Cela coïncide pleinement avec l'intention
du gouvernement hongrois : nous nous efforçons de nous impliquer
plus activement qu'auparavant dans la coopération bilatérale, régionale
et sub-régionale. Nous accordons une attention toute particulière
au respect des obligations contenues dans les traités de base et
à la résolution des problèmes qui n'ont pas été réglés par ces traités,
en interprétant ces actions comme une contribution supplémentaire
à la démocratisation et à la stabilité de notre région.
Dans le développement des relations avec nos pays voisins, nous
partons du principe que les communautés hongroises vivant au-delà
des frontières jouent un rôle important dans le renforcement de
la stabilité et dans l'avancement de la prospérité économique en
Europe Centrale. La politique étrangère hongroise souhaite en même
temps contribuer à l'amélioration des relations avec les pays voisins,
ainsi qu'à la protection des droits et de l'identité des minorités
hongroises vivant à l'étranger. Nous sommes convaincus que ces deux
aspects ne sont pas irréconciliables, mais au contraire, peuvent
et doivent être mis en œuvre d'une manière concertée.
En poursuivant l'objectif de l'amélioration de la stabilité régionale,
la Hongrie a intérêt à maintenir et à renforcer l'engagement euro-atlantique
de ses voisins. Ainsi, notre pays accorde-t-il une grande importance
au maintien de la crédibilité du processus d'élargissement de l'OTAN
et souhaite-t-il apporter une aide active et pratique à la préparation
de ses voisins à l'admission. Parmi d'autres, cela fut notamment
une des raisons pour la création du bataillon roumano-hongrois de
maintien de la paix, pour la formation de la brigade hungaro-italo-slovène,
et pour la volonté hongroise pour que des consultations et des échanges
réguliers de nos expériences réciproques aient lieu avec nos voisins.
Nous sommes convaincus que l'élargissement est le moyen le plus
efficace et le plus rentable pour renforcer d'avantage la sécurité
en Europe. Nous avons un intérêt particulier à ce que nos voisins
mentionnés au sommet de l'OTAN à Madrid, à savoir la Roumanie et
la Slovénie, remplissent le plus rapidement possible les conditions
requises pour devenir membre de l'Alliance et qu'ils y soient admis.
Nous nous félicitons également de l'orientation résolument euro-atlantique
du gouvernement Slovaque, grâce à laquelle il est devenu possible
pour la Slovaquie de retrouver sa place à la fois au sein de la
coopération Visegrád et parmi les pays qui ont les meilleures chances
de s'intégrer dans les organisations euro-atlantiques. En outre,
nous souhaitons continuer à jouer un rôle actif et à prendre des
initiatives dans le cadre du Conseil de Partenariat Euro-Atlantique
(CPEA) et dans celui du Partenariat pour la Paix (PpP). A notre
avis, le CPEA peut apporter de nouvelles possibilités concrètes
dans de nombreux domaines liés au sujet de la sécurité et de la
coopération dans la région. La Hongrie souhaite également se servir
de ce cadre pour apporter un soutien aux efforts pour l'intégration
euro-atlantique des pays qui n'ont pas été admis au premier cercle
de l'élargissement mais qui souhaitent entrer dans l'OTAN.
La meilleure utilisation des structures de coopération régionale
existantes et la mise en place de nouvelles structures, si nécessaire,
constituent non seulement d'importants facteurs de stabilité pour
la région, mais font partie intégrante de l'ensemble de nos efforts
d'intégration. A travers la coopération bilatérale et multilatérale
des pays de la région, il sera possible d'éviter l'isolement ou
une concurrence mal placée entre les pays bien engagés dans le processus
d'intégration d'une part et, ceux qui ne sont qu'à la phase initiale
de ce processus d'autre part.
L'entrée dans l'OTAN a ouvert un nouveau chapitre dans l'histoire
moderne de la Hongrie. Elle a signifié le succès de l'un des objectifs
stratégiques de la politique étrangère hongroise et a donné un nouvel
élan à la coopération, tant avec nos alliés de l'OTAN qu'avec nos
partenaires de la région euro-atlantique.
On dit fort justement : "Se trouver, c'est un début prometteur,
rester ensemble, c'est un progrès, et travailler ensemble c'est
la réussite." Si tel est le cas, nous avons tout le droit d'espérer
une coopération fructueuse pour l'avenir.
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